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Raphaël Coleman, écrivain
16 février 2018

Impressions de lecture : "Les cerfs-volants de Kaboul" de Khaled Hosseini

"Les cerfs-volants de Kaboul", c'est un bouquin que j'ai lu il y a peut-être huit ou neuf ans, alléché par un quatrième de couverture qui m'avait alors intrigué :

"De Kaboul à San Francisco, des années 70 à nos jours, une déchirante histoire d'amitié et de trahison, avec, en arrière-plan, la chronique tourmentée d'un pays dévasté : l’Afghanistan.

Bien que frères de lait, Amir et Hassan ont grandi dans des mondes différents : le premier est le fils d’un riche commerçant, le second est le fils de leur serviteur. Inséparables, liés par une même passion, les deux garçons se vouent une amitié indéfectible.

Mais ce lien va se briser à jamais. Alors que sous ses yeux, Hassan subit une véritable ignominie, Amir reste pétrifié. Peur ? Lâcheté ? Honte ? Pris dans une terrible confusion des sentiments, il n'esquissera pas un geste pour sauver son ami.

Été 2001. Réfugié depuis plusieurs années aux États-Unis, Amir reçoit un appel du Pakistan. "Il existe un moyen de te racheter", lui annonce la voix au téléphone. Mais ce moyen passe par une plongée au cœur de l'Afghanistan des talibans... et de son propre passé."

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L'été 2001, soit quelques semaines à peine avant le 11 septembre. Persuadé que ce récit est en lien avec les tragiques événements qui ont secoué l'Amérique à cette date, je découvre non seulement qu'il n'est aucunement lié à cela, de près ou de loin, mais aussi et surtout qu'il est infiniment plus profond et plus fort que tout ce que je m'étais imaginé à son sujet. Et il ne m'a en rien déçu, bien au contraire. Merveilleusement écrite, cette plongée au coeur de l'Afganistan, de son histoire immédiate, de ses coutumes, de sa civilisation est le regard d'un enfant du pays, exilé au pays de l'Oncle Sam, sur la terre de ses ancêtres telle qu'il l'a connue minot et sur ce que les hommes en ont fait. Un regard très éloigné des clichés, de toutes ces idées reçues que l'on peut avoir nous, occidentaux de culture chrétienne, sur ce peuple et sa religion que l'on connaît si mal.

Mais sa dimension autobiographique lui octroie une dimension humaine que je n'ai jamais retrouvée nulle part : celle de l'humilité, de la reconnaissance de ses fautes, sa lâcheté, du pardon, de la rédemption d'un homme qui n'a jamais été qu'un être humain, avec ses forces, ses faiblesses, ses remords. Et un passé qui lui colle à la peau, le hante.

"Je songeai au rêve d'Hassan, celui où nous nagions tous les deux. "Il n'y a pas de monstre", avait-il affirmé, "seulement de l'eau". Il se trompait. Il existait bien un monstre, qui l'avait saisi par les chevilles pour l’entraîner vers les noires profondeurs du lac. Moi."

C'est une histoire d'amitié, de fraternité, d'amour, de regrets, de fierté, de racines, de tout ce qui compte mais qu'on sacrifie parfois quand même sur l'autel de valeurs infiniment plus mineures...

C'est un récit dense, intense, qui nous fait traverser une palette très étendue d'émotions brutes et ne nous laisse jamais indemnes : de la beauté et la simplicité des joies les plus enfantines symbolisées par les batailles de cerfs-volants à l'âpreté, la dureté de tout ce que l'humanité peut revêtir de plus laid (l'intolérance, la violence, la guerre...), il ressort de tout ceci un formidable hymne à la paix, au respect de l'autre, la nostalgie aussi de la perte de l'innocence enfantine qui peut se produire bien malgré nous, à n'importe quel moment de notre existence, à notre corps défendant.

"Je suis devenu ce que je suis aujourd'hui à l'âge de douze ans par un jour glacial et nuageux de l'hiver 1975. Je revois encore cet instant précis où, tapis derrière le mur de terre à demi éboulé, j'ai jeté un regard furtif dans l'impasse située près du ruisseau gelé. La scène date d'il y a longtemps mais, je le sais maintenant, c'est une erreur d'affirmer que l'on peut enterrer le passé : il s'accroche tant et si bien qu'il remonte toujours à la surface. Quand je regarde en arrière, je me rends compte que je n'ai cessé de fixer cette ruelle déserte depuis vingt-six ans."

Pour l'anecdote, le film qui en a été adapté a été tourné en Chine en raison de l'impossibilité de le faire en Afghanistan, et les enfants jouant Amir et Hassan ont été pris en charge (notamment pour leur scolarité et leur "exil") par la société de production pour les protéger d'éventuelles représailles du régime Afghan.

"Les cerfs-volants de Kaboul", un livre essentiel, à lire absolument.

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